Se reconvertir pour vivre de sa passion, beaucoup y songent, peu osent le faire ! Pragmatisme quand tu nous tiens !! Pourtant, certains y parviennent, nous en sommes les témoins.
Aujourd’hui, j’ai donc eu envie de partager avec vous l’histoire de Malala Guindo, devenue coach vocal après un parcours très « bonne élève »… Découvrez son histoire porteuse d’espoir dans cette interview intimiste et riche d’enseignements.
Vous êtes aujourd'hui coach vocal, mais je crois savoir que cela n'a pas toujours été une évidence pour vous, quelle était la place de cette passion dans votre vie d'enfant ?
Effectivement, rien ne me prédestinait à devenir coach vocal, au regard d’un contexte familial strict et régenté par une culture où la réussite professionnelle était largement attribuée aux métiers intellectuels.
Avec un papa ingénieur et une maman enseignante en biologie, le ton était donné, je devais suivre un chemin où seuls la science exacte et le pragmatisme avaient leur place. Et il a fallu que la vie, me donne, comme passions … le chant et l’écriture !
Je ne me voyais pas m’opposer à ce bloc que formaient mes parents, malgré une vague tentative de ma part pour en parler. J’ai opté pour la facilité et grandi dans la peau d’une bonne élève, me contentant de chanter en leur absence et d’écrire seulement quand je le pouvais, en général après minuit, dans le calme de la maison endormie.
Au grand bonheur de mon père, j’ai suivi un chemin « raisonnable » en passant un bac scientifique, puis en intégrant une grande école de commerce.
Avant de devenir coach vocal, vous avez démarré votre carrière comme ingénieur commercial, comment avez-vous vécu ces premières années de travail ?
On m’a proposé ce poste, suite à mon stage de fin d’études dans une multinationale informatique. Commercialiser des solutions de gestion informatiques auprès des Banques et des industriels ne résonnait pas vraiment en moi mais je me suis laissée emporter par la vague sans me poser de question.
D’un autre côté, c’était difficile de se plaindre, quand on côtoyait du beau monde, et qu’on vivait très confortablement, entre voyages et hôtels 5 étoiles !
J’ai fini par y trouver une certaine forme de réconfort. Avec le recul, à défaut d’occuper le poste de mes rêves, je crois que je me suis surtout servie de son aspect prestigieux pour combler mon besoin d’attention.
On parle souvent de l'importance des rencontres et des opportunités à saisir pour s'épanouir dans son travail, comment la femme pragmatique que vous étiez a-t-elle su profiter de ces cadeaux de la vie ?
La vie a mis sur mon chemin de nombreux cadeaux, comme la rencontre avec mon conjoint avec qui je vis maintenant depuis 14 ans. Il est né, comme moi, à Madagascar mais a suivi un tout autre chemin puisqu’il est arrivé en France à l’âge de 6 ans. On s’est mariés sur les chapeaux de roue, six mois après notre rencontre. Dans la foulée, j’ai quitté mon travail, ma famille et mon île natale pour venir m’installer en France. Pour être tout à fait honnête, j’aimais mon conjoint, mais j’y voyais en même temps une opportunité de quitter le poste d’ingénieur commercial que j’occupais depuis quatre ans et dont le côté doré ne réussissait plus à combler mon besoin profond de créer et de m’exprimer. J’aspirais à de nouvelles aventures.
Avant de transiter de votre vie d'ingénieur commercial à celle de coach vocal, vous avez testé de nombreux postes, que cherchiez-vous à ce moment-là ?
Depuis mon arrivée en France, j’ai occupé de nombreux postes mais de manière assez fugace. Coordinatrice dans l’immobilier, organisatrice d’évènements internationaux, assistante export, formatrice sont des exemples de postes que j’ai pu occuper mais qui ne m’ont pas donné entière satisfaction.
Toutefois, chaque poste m’a enseigné quelque chose. Par exemple, que la création n’était pas réservée aux domaines de l’art, que j’aspirais à mener des projets de A à Z, et que j’éprouvais de la gratification en transmettant mes compétences. Cette séquence n’était donc pas qu’une suite d’expériences infructueuses mais bien des éléments du puzzle faisant partie intégrante de ma vie aujourd’hui.
Comme souvent dans les parcours de reconversion, il y a eu pour vous un point de bascule, pouvez-vous nous expliquer ce qui s'est passé ?
Je me souviendrai toujours de ce jour…
J’occupais un poste d’assistante dans une entreprise exportatrice de dindonneaux. J’avais commencé trois semaines plus tôt. On m’avait préparé psychologiquement avant ma prise de poste… J’allais être régulièrement confrontée à la mortalité de dindonneaux pendant leur transport vers des pays où ils étaient envoyés, dans des boîtes où ils étouffaient par manque d’oxygène ou à cause de la chaleur.
Il fallait l’accepter. C’était comme ça.
Et un jour, cela m’est tombé dessus. Un blackout total qui a duré plusieurs heures. Je ne savais pas ce que je faisais là et je regardais fixement mon écran d’ordinateur sans être capable de savoir ce qu’il fallait faire. Même mes doigts sur la souris ne répondaient plus. Mes collègues ne savaient pas quoi faire.
J’avais atteint un point de bascule. Et j’ai su que ma vie ne serait plus jamais comme avant.
Comment avez-vous fait pour sortir de cette phase et laisser libre cours à votre passion en vous orientant vers le coaching vocal ?
J’ai eu de la chance car j’étais encore en période d’essai quand cela est arrivé et mon employeur a accepté de me payer jusqu’à la fin prévue initialement de ma période d’essai. Cela m’a permis de m’extraire instantanément de cet environnement. Du jour au lendemain, j’avais du temps pour moi sans me soucier d’aller « gagner de l’argent ».
Dans la continuité du blackout, j’ai littéralement ramené la vitesse de ma vie de 120 km/h à 0km/h. J’avais besoin de ne rien faire. Absolument rien. Cela a duré plusieurs mois. Je n’avais aucun rendez-vous dans mon agenda. Je n’ai pas cherché à parler à qui que ce soit, à aller chercher des réponses à l’extérieur. Je n’attendais plus rien. Et je crois que ça a été salutaire, car ça a laissé de la place à autre chose.
J’ai commencé à ressortir pour me balader dans la nature, chose que je ne faisais jamais auparavant. J’étais dans le moment présent, prêtant attention à ce qui m’entourait et à mes sensations internes. J’écrivais beaucoup. Et je lisais beaucoup. Un des livres qui m’a fait du bien est « Fais ce qui te plaît » de Maud Simon. Bien qu’il ne m’ait pas permis de trouver ma voie dans la foulée, il a commencé à faire bouger les lignes.
Et un jour, je me suis sentie prête à m’ouvrir à d’autres possibilités. Je suis donc retournée voir ma coach pour un accompagnement individuel et elle m’a aidée à ouvrir les yeux sur cette vérité qui avait été enfouie en moi depuis tant d’années.
Je voulais chanter ! Et mes futures actions allaient tourner autour de ce fil rouge-là…
D’un point de vue pragmatique, comment avez-vous organisé votre transition vers le métier de coach vocal ?
Entre mon rêve de petite fille et ma réalité d’adulte, du temps est passé et la forme de mon rêve d’enfant a changé. Une fois mon « axe » trouvé, il a fallu matérialiser ce rêve autrement qu’en devenant une pop star internationale !
Je me suis dit pourquoi pas la pédagogie qui m’a toujours plu. J’ai trouvé une formation un peu par hasard, sur Internet, qui acceptait les adultes qui n’avaient pas forcément suivi le cursus « conservatoire » même si une expérience scénique était demandée. J’ai envoyé ma candidature, passé un casting et j'ai été acceptée. Tout est parti de là.
Mon conjoint m’a soutenue à 100% dans cette démarche et il n’a même pas soulevé des éventuelles questions d’argent. Je lui suis éternellement reconnaissante pour son soutien et sa compréhension.
Aujourd'hui, vous êtes donc coach vocal, comment cela se passe-t-il ?
Je suis encore un « bébé » dans le domaine du coaching vocal mais je suis déjà très heureuse de faire ce métier qui conjugue l’artistique, la pédagogie, l’international et l’humain.
Je découvre, j’apprends et je grandis tous les jours. Je continue à me former sur la technique vocale, j’assiste à des congrès internationaux et participe à des stages de perfectionnement avec des coaches expérimentés et reconnus dans leur domaine. Cela m’amène à voyager un peu partout dans le monde. C’est grisant.
Mes parents étaient sceptiques par rapport à ma reconversion. Ma mère a fini par l’accepter et se réjouit de mon nouvel axe. Mon père, lui, a préféré renier la situation. Il ne sait pas ce que je fais et ne veut pas le savoir. On a de moins en moins de contact. J’aimerais pourvoir dire que cela n’a pas d’importance mais ce n’est pas vrai, cela fait partie des blessures à gérer. Toutefois, je me suis détachée de toute attente.
Vous exercez comme coach vocal indépendant, une question taraude toujours les personnes qui hésitent à se lancer: est-ce qu'on en vit ? Et si oui, comment faites-vous ?
Avant de devenir indépendante, j’étais dans une coopérative culturelle de ma région qui a hébergé mon projet pendant six mois. J’ai pu bénéficier d’un perfectionnement en gestion financière pour les entrepreneurs et cela m’a aidée à garder une vision élevée de mon business.
Une chose que tout entrepreneur doit garder en tête, c’est la réussite. Cela ne sert à rien de monter un business si, financièrement, celui-ci n’est pas viable, même si j’entends bien que tout le monde n’a pas les mêmes besoins financiers.
Pour cela, il faut bien distinguer la passion du business, même si ce dernier peut être monté autour de cette passion. Il faut s’organiser, communiquer, savoir s’entourer, monter des partenariats, fédérer.
Toutes mes expériences en entreprise prennent ici tout leur sens. Je remercie mes parents pour l’aspect pragmatique qu’ils m’ont inculqué et qui me permet aujourd’hui de matérialiser mon rêve en gardant la tête sur les épaules.
Aujourd’hui, j’ai atteint le niveau de salaire que j’avais quand je travaillais en entreprise, en utilisant seulement 35% de mon temps comparé au temps global que je passais à travailler en tant que salariée, ce qui me permet de développer d’autres axes de projets. Le chant reste toujours au cœur de mes activités mais, par ricochet, je travaille également dans la création de spectacles, l’écriture et je suis actuellement sur un projet assez inédit, mêlant la pédagogie, la création, la musique, la prestation de services et d’autres domaines connexes à la voix mais, pour l’instant, je ne peux pas en dire plus... :)
Merci Malala pour cette belle histoire vraie. Pour ceux qui le souhaitent, vous pouvez retrouver Malala Guindo pour un cours de chant sur Angers en la contactant ici.
Quant à moi, je vous dis à bientôt pour vous aider à transformer vos passions en un projet pragmatique !
Annabelle pour Cap Cohérence