Yannick a 42 ans. Après des études de langues et une formation d’Educateur Spécialisé, il a exercé durant 10 ans eu sein d’EHPAD (maisons de retraite médicalisées) le métier d’Animateur en Gérontologie. Il y a 4 ans, il a ressenti le désir de changer d’orientation professionnelle et de donner un nouveau sens à sa vie. Aujourd’hui, il est conseiller en gestion patrimoniale, salarié d'une grande compagnie d'assurances.
J’ai désiré recueillir son témoignage pour répondre à une question qui nous est souvent posée : comment se reconvertir à 40 ans et devenir (ou rester) salarié? Comment palier le handicap du manque d’expérience? Un employeur peut-il vous faire confiance si vous êtes inexpérimenté?
Le témoignage de Yannick est, me semble-t-il, la meilleure réponse à cette question ; j’espère que son histoire vous prouvera que l’absence d’expérience professionnelle est un obstacle tout à fait surmontable. Ecoutons- le.
Une démarche facilitée par la DRH
Muriel : Yannick, quelle place accordes-tu au travail dans ta vie?
Yannick : Tout au long de ma vie, j’ai placé mon travail au centre de mon existence, mon but était d’acquérir et d’affiner mes connaissances et mon expérience. Je veux dire par là que mon travail occupait davantage la place de but que de moyen. De ce fait, mon épanouissement professionnel revêtait une importance primordiale, épanouissement que je croyais avoir atteint.
Muriel : Que s’est-il, passé? Comment est venue cette idée d’effectuer une reconversion?
Yannick : Suite à un arrêt de travail, j’ai effectué un bilan personnel, j’ai réfléchi sur moi : mes désirs, mes aspirations, mon vécu, la place de mon travail, mon mode de vie au sens large m’épanouissait-t-il ? J’ai d’abord réalisé cette réflexion seul, puis j’ai entamé une recherche personnelle avec un sophrologue spécialisé en gestion du stress. Cette approche différente m’a permis de prendre encore plus de recul vis-à-vis de moi même.
Les conclusions ont été claires et sans appel !
Je me fatiguais dans un emploi qui ne m’apportait plus le carburant nécessaire pour avancer dans ma vie. Je puisais au fond de moi pour insuffler de l’énergie vitale dans un lieu où elle était absente. L’accompagnement fin de vie, clé de voûte de mon activité m’avait bel et bien mis à l’arrêt. J’étais proche du burn out.
Il me fallait donc changer de boulot ! Mais comment, pour faire quoi, et avec quel argent ?
Mon employeur d’alors a bien ressenti mon malaise et m’a proposé une rupture conventionnelle. La demande venant de lui, je me suis trouvé en position très favorable.
En discussion avec la DRH du groupe pour lequel je travaillais, j’ai construit mon projet de reconversion : suivre une formation professionnelle courte et accélérée et obtenir les moyens de subsister en attendant d’exercer un nouveau métier. Elle était d'accord pour m'accorder les financements que je lui demandais.
C’est à ce moment là que j’ai rencontré une personne décisive qui allait me permettre de concrétiser ma reconversion.
Il suffit d'une rencontre... Le hasard fait parfois bien les choses.
Muriel : Raconte-nous vite cette rencontre!
Yannick : En rentrant chez moi à pied, suite à un rendez-vous inutile au CIO de ma ville, rendez-vous durant lequel mon « profil atypique » avait posé plus de questions qu’apporté de véritables réponses de la part du conseiller d’orientation, je me suis arrêté devant une enseigne qui proposait un «entrainement intensif aux techniques de vente». Me voyant flâner devant le centre, l’assistante de direction de Booster Academy m’a invité à entrer et nous avons longuement échangé. Une formation rapide et pratique me permettrait d’acquérir les compétences de base du métier de commercial. A 38 ans, je n’avais pas le temps ni l’argent pour repartir 3 ou 4 ans en formation théorique.
L'idée de devenir commercial m'a séduit!
J’ai donc, après l’avoir construit, présenté ce projet à ma DRH qui l’a validé, puis financé, majorant l’indemnité de rupture de contrat de travail d'un capital supplémentaire. Mon employeur a aussi financé ma formation Booster Academy dans le cadre d’un DIF.
La reconversion : du projet à sa réalisation
Muriel: Comment se sont passés ta formation et tes débuts dans ta nouvelle fonction de commercial?
Yannick : L’assistante de direction m’a accompagné au fil des entrainements aux techniques de vente, cela a duré 5 à 6 mois. Cette période a été financée par mon désormais ancien employeur puis Pôle Emploi a pris le relais (avec les indemnités légales).
Parallèlement à ma formation, j’ai trouvé mon premier emploi de commercial, pas très concluant au demeurant. Puis la formation terminée, j’ai décroché mon second contrat de travail, un CDD de 8 mois. Au cours de cette mission, j’ai rencontré, lors d’un Petit Déj' réseau organisé par Booster Academy, un Conseiller en Gestion Patrimoniale qui travaillait dans un groupe privé, groupe qui allait prochainement procéder à des recrutements. Je me suis donc lancé dans la voie du conseil patrimonial, voie que je trace, avec beaucoup d’épanouissement depuis 3 ans.
Le métier de commercial, qui s’est imposé à moi de façon claire, m’a permis de rencontrer des gens/clients, de leur apporter un conseil, de les suivre tout au long de la réalisation de leur projet. La relation à l’autre, le lien social ont toujours été importants dans ma vie professionnelle mais aussi personnelle.
Aujourd’hui, j’ai acquis une certaine expertise dans mon secteur d’activité, j’ai construit une expérience avec, comme base, une formation prodiguée par mon employeur. J’ai développé et accentué cette formation pour monter en compétences.
Je rencontre régulièrement mes clients, je développe mon portefeuille, je prends beaucoup de plaisir dans mon activité. La notion de plaisir est devenue incontournable dans mon travail. Et le bien-être que j’en retire se ressent considérablement dans ma vie privée qui s’est transformée, elle aussi.
Prendre des risques, d'accord, mais sans se mettre en danger.
Muriel : Pourquoi as-tu choisi de rester salarié? tu aurais pu saisir l’occasion et travailler à ton compte…
Yannick : Il est vrai que j’avais le choix entre deux statuts : exercer en tant que salarié ou en tant qu’indépendant.
Prendre des risques est important dans une reconversion, des risques calculés, j’entends. Ma dynamique de vie est faite de prises de risques quotidiennes, j’ai le goût du challenge. Mais me mettre en danger serait inutile. Le statut salarié me garantit une protection (salaire, formation au sein de l’entreprise, accompagnements pour accroître les compétences…) et le statut d’indépendant, que j’embrasserai un jour, me paraissait trop hasardeux pour débuter une nouvelle activité. En effet, pas de garantie salariale, avec les seuls revenus de mon activité pour vivre, seulement si celle-ci permet d’en générer, ce qui me paraissait peu probable il y a 3 ans. J’ai donc opté pour un statut salarié en envisageant de me diriger vers une totale autonomie dans quelques années, selon mon plan de carrière.
L'entreprise préfère un gars "qui en veut" plutôt qu'un gars qui a de l'expérience !
Muriel : N'as-tu pas souffert de ton manque d'expérience? Cela a dû être un gros handicap pour être embauché, non?
Yannick : Dans mon secteur d’activité, le secteur commercial, les recruteurs vont davantage privilégier la motivation, le gout du challenge que l'expérience professionnelle. Changer de voie professionnelle à 40 ans renvoie au recruteur un sens de la saisie d’opportunités qui séduit. L’entreprise apprécie les collaborateurs «qui en veulent».
Un commercial qui n’a pas suffisamment d’expérience doit savoir séduire son futur employeur, comme tout prétendant à un poste. Pourquoi moi et pas un autre !
J’ai, pour ma part, une adaptabilité et un appétit d’apprendre très développés, cela me sert tous les jours. Et puis dans tous les métiers, l’apprentissage est quotidien, il est primordial d’en être conscient, j’ai appris et j’apprends au fil du temps.
En commençant dans un groupe d’assurances « mono produit », j’ai acquis les bases du conseil en gestion patrimoniale, cela m’a permis d’être «débauché» par une grande compagnie britannique. Ma première expérience a été la base sur laquelle je me suis ancré pour développer mes compétences. Aujourd’hui, j’exerce dans une compagne qui a une offre globale, proposant ainsi à mes clients une réponse d’ensemble à leurs projets.
J’ai donc commencé par acquérir des techniques de base dans le secteur, puis j'ai ensuite développé et étoffé mes savoirs pour les transformer en une vraie compétence dans mon domaine, et ce, de façon globale.
La chance, ça se provoque. Et les risques, ça se calcule!
Muriel : Tu pratiques ton nouveau métier depuis 3 ans maintenant, quel regard portes-tu aujourd'hui sur ta reconversion? Qu'as-tu envie de dire à tous ceux qui n'osent pas faire le pas?
Yannick : Lors d’une reconversion, l’appréhension ne me parait que le fruit du besoin de sécurité. Je sais ce que j’ai mais pas ce que j’aurai… eh bien, j’ai construit ce que j’ai aujourd’hui. Prendre un risque n’est jamais dangereux dans la mesure où il est étudié et réfléchi. Lorsque j’ai rencontré des opportunités, même si mon entourage était réticent, je me posais une seule question : « qu’est ce que je risque ? »
Je pense avoir eu de la chance dans mon parcours, chance que j’ai provoquée en saisissant toujours les opportunités qui m’amenaient vers un mieux.
Muriel : Merci, Yannick, pour ton témoignage et pour le temps que tu m'a accordé. Je te souhaite de réussir dans ton nouveau job!
Muriel Nottin