Le facteur vient de vous déposer une lettre recommandée avec accusé de réception. Elle provient … de votre employeur ! Vous l’ouvrez et découvrez « … nous vous prions de vous présenter … pour un entretien en vue d’une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement… vous pouvez vous faire assister par une personne … ».
Vous êtes sous le choc. Vous disposez d’environ 5 jours avant le fameux entretien.
A quoi sert un entretien préalable à licenciement ? Que va-t-il se passer ? Comment préparer un entretien de licenciement ?
A quoi sert un entretien préalable à licenciement ?
L’employeur qui envisage de sanctionner ou de licencier un salarié, quel qu’en soit le motif (personnel, économique ou inaptitude) doit, avant toute décision, convoquer le salarié à un entretien préalable.
L’entretien préalable au licenciement a pour objectif :
- pour l’employeur : de vous exposer les raisons qui l’amènent à envisager une sanction ou un licenciement
- pour le salarié : c’est l’occasion de donner son point de vue et toutes les explications qu’il jugera nécessaires.
En aucun cas l’employeur ne vous fera part de sa décision en fin d’entretien !
En effet, la loi impose à l’employeur d’attendre deux jours francs minimum avant de vous notifier le licenciement.
Votre présence à cet entretien préalable au licenciement n’est pas obligatoire (et votre absence n’empêchera pas l’employeur de poursuivre la procédure de licenciement), mais il serait dommage de rater cette occasion, souvent l’unique, de donner votre version des faits et tenter de convaincre votre employeur.
L'employeur va-t-il forcément me licencier ?
Non, pas forcément! Voici ce qu’il faut savoir …
La lettre de convocation à un entretien préalable à licenciement répond à un certain formalisme juridique : l’employeur qui envisage de sanctionner un salarié doit faire figurer un certain nombre de mentions obligatoires dans la lettre de convocation.
La lettre de convocation à entretien préalable doit clairement comporter la précision « …vous êtes convoqué(e) à un entretien en vue d’une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. ». Même si votre employeur a prévu de vous infligez une sanction du type avertissement ou mise à pied, il prévoira malgré tout cette mention « pouvant aller jusqu’au licenciement ». Cela lui laissera éventuellement la possibilité d’opter pour un licenciement, si vos explications lors de l’entretien ne l’auront pas convaincu. Si cette mention n’était pas précisée, il ne pourrait pas, dans ce cas, procéder à un licenciement.
Il est donc courant que l’employeur précise dans la lettre de convocation « …pouvant aller jusqu’au licenciement… » bien qu’il n’envisage qu’un avertissement ou une autre sanction.
Pas de panique donc, ces quelques mots gravés dans votre mémoire « …pouvant aller jusqu’au licenciement » ne veut pas dire que vous allez forcément être licencié !
Parmi les mentions obligatoires figurent également la possibilité offerte au salarié de se faire assister lors de cet entretien. Vous pouvez donc choisir de vous faire assister par un membre du personnel de votre choix (à la condition que votre entreprise ait un Comité d’Entreprise ou des délégués du personnel). En l’absence d’institutions représentatives du personnel, vous pourrez vous faire assister par un conseiller inscrit sur une liste consultable en mairie ou à l’inspection du travail.
Il est primordial pour vous de bien préparer cet entretien. Pour vous aider dans cette tâche, je laisse la plume à Charly Jucquin, fondateur de Cap Cohérence, pour un article écrit à 4 mains :-)
Comment préparer son entretien préalable à licenciement ?
Il est vrai qu'à part certains spécialistes comme Lucette Stamm - notre partenaire sur le sujet que vous pouvez contacter de notre part ici, absolument personne n’est formé pour vivre et mener une procédure de licenciement ! Pour avoir vécu cette douloureuse (mais structurante) expérience, voici mon éclairage et quelques conseils sur ce moment important de votre vie professionnelle !
Pour réussir son licenciement, il n’y a qu’un secret : négocier ! Et surtout, ne pas négocier seul ! Entourez-vous de spécialistes qui mèneront les négociations pour et avec vous : délégués du personnel ou syndicats (les plus qualifiés sont la CGT et la CFE-CGC pour les cadres). Toute la difficulté sera de trouver la bonne personne : une personne en qui vous avez confiance, qui connaît parfaitement le droit du travail et les diverses jurisprudences, qui sait traiter avec les directions des ressources humaines, qui a une autorité et enfin, qui agira en faisant en sorte de respecter vos valeurs et vos souhaits. Vous devez pouvoir contrôler le processus. Ne laissez pas quelqu’un vous amener vers le Conseil des Prud’hommes alors que vous n’en avez pas envie ! Et pour vous assurer d'être en mesure de gérer émotionnellement la pression, de ne pas perdre tous vos moyens le jour J, n'hésitez pas à vous préparer psychologiquement avec un coach en amont de l'entretien.
Vous l'avez compris, toute procédure de licenciement débute par un entretien préalable au licenciement, auquel vous serez convoqué via une lettre recommandée. C’est lors de cet entretien que l’entreprise vous exposera ses griefs à votre égard et vous expliquera pourquoi elle envisage un licenciement. Vous pourrez alors donner votre version des faits. L’entreprise aura ensuite 48h pour décider si elle vous licencie ou non et vous en informera à nouveau par courrier recommandé.
Il est donc crucial de bien préparer votre entretien préalable à licenciement !
Pour cela, voici 5 conseils essentiels:
- Relisez votre contrat de travail et votre convention collective à jour
- Choisissez soigneusement la personne qui vous accompagnera à cet entretien et tout au long de la procédure de licenciement
- Consignez par écrit tous vos échanges avec l’entreprise
- Travaillez votre argumentation et votre interprétation des faits
- Allez à l’entretien détendu et calme. Il ne faudra en aucun cas s’énerver, perdre ses moyens ni se décrédibiliser
Lors de l’entretien, la personne qui vous accompagne aura comme rôle principal celui de témoin. Demandez-lui de consigner par écrit absolument tout ce qui se dira lors de l’échange. Cela pourra servir plus tard. Comme dans toute négociation, laissez d’abord s’exprimer votre interlocuteur, laissez-lui faire les premières propositions (vous pouvez être agréablement surpris) et gardez toujours des arguments sous le coude. N’abattez pas toutes vos cartes d’un seul coup.
Voici quelques points à vérifier en amont de l’entretien préalable à licenciement:
- Contrat de travail : est-ce que l’employeur l’a toujours respecté ? Est-ce que les faits qui vous sont reprochés sont liés à un engagement contractuel ? Est-ce que toutes les clauses sont légales ? Faites relire votre contrat par un avocat du travail en lui expliquant votre situation.
- Convention collective en vigueur : relisez-la en détail ainsi que tous les derniers amendements. Vérifiez que votre salaire est bien conforme aux minimums conventionnels. Vérifiez si l’employeur a bien respecté toutes les clauses.
- En théorie, lors de l’entretien préalable au licenciement, l’employeur n’est pas censé avoir pris une décision définitive à votre égard. Si vous êtes capable de prouver le contraire, et en général c’est faisable, alors l’entreprise est en tort et vous devez le signaler.
- Lettre de convocation à l’entretien : est-elle complète et légale ? Elle doit préciser l’objet, le lieu, le jour et l’heure de l’entretien. Elle doit expliciter que vous pouvez vous faire accompagner. Le délai entre la réception de la lettre et l’entretien ne doit pas être inférieur à 5 jours.
- Risques psycho-sociaux : avez-vous subit des pressions ? Avez-vous été anormalement stressé ? Avez-vous eu des problèmes de santé liés au stress ou au travail ? Avez-vous eu un arrêt maladie pour stress ou pour cause professionnelle ? Le Conseil des Prud’hommes n’aime pas trop que l’on joue avec la santé des salariés et il est très sensible aux risques psycho-sociaux. Donc mettez ces risques en exergue. Consultez votre CHSCT pour plus de renseignements.
Encore une fois, il est essentiel de bien préparer cet entretien et je n’insisterai jamais assez sur la nécessité de se faire accompagner, malgré les remarques que l’on peut vous faire. Pour ma part, j’ai eu droit à de nombreuses remarques de la part de certains de mes hiérarchiques. On m’a ainsi explicitement reproché d’être venu accompagné des syndicats à mon entretien, cherchant ainsi une confrontation immature... Sans commentaires… Les personnes qui font ces remarques n’ont absolument pas conscience du risque qu’elles prennent en tenant ces propos qui peuvent être réutilisés contre elles !
Quant à la suite de la procédure, vous allez recevoir 48h après l’entretien un courrier recommandé vous informant de la décision de l’entreprise. Si elle persiste dans sa décision de vous licencier, commencera alors la période de négociation à proprement parler, et pas avant! Vous allez discuter des conditions de votre départ. Et c'est justement l'objet d'un article dédié : Négocier un licenciement !
Charly Jucquin